Les acheteurs sont en bonne position pour acheter l’appartement ou la maison de leurs rêves. Le choix de biens en vente est vaste, les vendeurs sont enfin prêts à revoir leurs prix à la baisse et les taux de crédit ont encore fléchi.
Evidemment, personne ne sait si les prix sont au plus bas. Pour beaucoup de professionnels de l’immobilier, il n’est pas exclu qu’ils fléchissent encore dans les mois qui viennent. «Les prix peuvent encore baisser d’ici à l’automne parce qu’il y a vraiment beaucoup de biens à vendre sur le marché», estime Alexander Kraft, le président de Sotheby’s International Realty France-Monaco. Mais une grande partie de la baisse a été réalisée. Et elle ne se voit pas toujours dans les statistiques nationales. Globalement, les prix des logements ont reculé d’environ 2 % en France l’an dernier.
Localement, la chute des prix peut être beaucoup plus forte. Certains biens valent 20 % de moins qu’avant. Pas de surprise, l’évolution résulte logiquement de la confrontation de l’offre et de la demande. Les très grands appartements familiaux à Paris, pour lesquels l’offre est importante et les acquéreurs, de plus en plus rares, se négocient désormais couramment en dessous de 8000 €/m².
Les maisons isolées en pleine campagne, les appartements situés dans des zones où l’emploi est difficile restent aussi les grands perdants de ces ajustements des prix. Tout comme les appartements en rez-de-chaussée ou en premier étage qui sont toujours délaissés. Et, souvent, les biens pour lesquels il faut faire des travaux.
«Une maison de 180 m² en plein centre de Nantes qui nécessitait des travaux d’isolation et d’électricité s’est vendue récemment 460.000 €, alors qu’il y a trois ou quatre ans elle serait partie à 550.000 €», explique par exemple Me Thierry Thomas, président de l’Institut notarial de droit immobilier. «Le marché a corrigé ses excès, le dévissage des prix dans les petites villes est fait. L’écart s’amplifie entre les petites villes et les grandes agglomérations qui attirent, comme Bordeaux, Nantes, Montpellier et Lyon», estime Fabrice Abraham, directeur général du réseau Guy Hoquet.
Des acheteurs de mieux en mieux informés
Si l’intérêt pour l’immobilier revient, si les transactions repartent, les prix, eux, restent orientés à la baisse. Les acheteurs sont de mieux en mieux informés et ils font précisément leurs comptes. «Ils évaluent les travaux, se renseignent sur les baisses de prix et font des offres en conséquence», ajoute Me Thomas. L’immobilier est devenu un achat plus raisonné qu’autrefois. La psychologie des acheteurs est en train de changer. Les négociations ne sont plus taboues. Les acquéreurs tentent leur chance, surtout quand ils prennent position sur un marché qui est fragile. C’est le cas, par exemple, lorsqu’ils veulent s’offrir une résidence secondaire: les visites et les offres commencent à repartir dans des destinations de vacances prisées comme par exemple Biarritz, Dinard ou La Baule. Pas question pourtant pour ceux qui s’aventurent sur ce marché d’acheter à n’importe quel prix. «Certains Français font maintenant des offres agressives, ils n’hésitent pas à proposer 30 % plus bas que le prix proposé. Avant, seuls les étrangers osaient le faire», ajoute Alexander Kraft. Bien sûr, il est rare d’obtenir alors entière satisfaction, mais certains arrivent à décrocher de substantielles baisses de prix, de 15 à 20 % parfois. D’autant que certains prix de présentation avaient été clairement tirés à la hausse par des vendeurs trop gourmands.
Les investisseurs de retour
Plus agressifs, mieux informés, les Français ont retrouvé le goût de la pierre. Même les investisseurs qui avaient déserté le marché, tétanisés par la loi Duflot (dont même le nom a été effacé), sont en train de revenir. Les assouplissements apportés par le gouvernement les ont rassurés. «Depuis l’automne, depuis que Mme Duflot est partie, ça va mieux. Les particuliers sont revenus dans les bureaux de vente. Le premier trimestre est correct», explique François Bertière, le président de Bouygues Immobilier.
Le nouveau système Pinel, qui propose une réduction d’impôt pour les particuliers investissant dans un logement en vue de le louer, fonctionne bien. «C’est un mécanisme intelligent», estime Fabrice Abraham.«La possibilité de louer à ses enfants ou à ses ascendants et la souplesse de pouvoir s’engager sur 6, 9 ou 12 ans sont des éléments importants qui pèsent dans la décision des investisseurs» ajoute François Bertière.
Si une loi mal ficelée et trop contraignante, comme la loi Duflot, a fait fuir les investisseurs, une autre loi, plus souple, a su rapidement les y ramener. C’est le signe d’un lien fort entre les Français et la pierre. «L’immobilier reste un investissement qui rassure, principalement pour préparer sa retraite, selon 53 % des Français», résume Patrice Pichet, le président du groupe Pichet.
Ce printemps, saison traditionnellement porteuse pour les achats immobiliers, tous les acteurs de l’immobilier évoquent «un frémissement». Et, bonne nouvelle, il concerne plusieurs segments du marché, aussi bien le neuf que l’ancien, les résidences principales ou les investissements locatifs, et même les résidences secondaires. «On sent que ça bouge», confirme Charles-Marie Jottras, le président de Féau.
Entre les prix qui ont baissé, les crédits qui permettent d’emprunter à taux fixe à moins de 2 % sur 15 ans, le fait que les autres placements (hormis les actions) ne rapportent plus grand-chose, les raisons de s’intéresser à l’immobilier sont nombreuses. En 2014, le pouvoir d’achat des Français a augmenté de 0,4 % selon l’Insee. C’est peu, mais c’est positif. Les particuliers qui ont un projet immobilier constatent surtout qu’ils peuvent s’offrir ce qu’ils ne pouvaient pas acheter il y a quelques années en raison du recul des prix et des conditions de crédit. Grâce à la seule baisse des taux, ils ont gagné 18 % de pouvoir d’achat en trois ans.
Mieux, pour les étrangers qui s’intéressent à la pierre française, la politique de la Banque centrale européenne qui a fait chuter l’euro est une excellente nouvelle. Pour eux, la France est tout à coup devenue une bonne affaire. C’est le cas pour les Américains, les Britanniques et les Suisses par exemple. Certains Français expatriés à Londres saisissent d’ailleurs l’opportunité de s’offrir dans leur pays natal un pied à terre à prix d’ami.
Au bout du compte, seuls les primo-accédants semblent rester sur le bord de la route. Pas par manque d’envie, mais souvent par manque de fonds. Ils ont du mal à financer leurs acquisitions. Les banques sont en effet toujours très strictes dans l’octroi de leurs prêts. Elles exigent la plupart du temps que l’emprunteur ait un contrat à durée indéterminée et l’évolution des conditions d’attribution du PTZ, le prêt à taux zéro, n’est guère favorable. Il donne un vrai coup de pouce en zone non tendue rurale, là où la demande est faible, et il est moins généreux qu’avant en zone tendue, là où se trouvent les besoins.